la légende du liban ,son cedre ,Nouhad Haddad surnommé Fairouz ,est la vraie perle des mers comme son nom l'indique une voix toute de douceur une allure de fée.

Quasi épidermique


Sa voix de velours, que ses inconditionnels jugent plus grave et plus sensuelle que par le passé, est enveloppante. Elle entraîne chaque personne présente au fond de soi, à travers ces histoires d’hier et de toujours, d’amoureux qui se séparent, de croisée de chemins, de souvenirs et de douce nostalgie. Elle l’envoûte surtout par ses modulations, ses inflexions, son rayonnement qui provoquent une réaction quasi épidermique. C’est par tous les pores de sa peau que l’on écoute Feyrouz. Et lorsqu’elle entonne des hymnes à la liberté et à la dignité, à l’instar du fameux Nachid al-oumamia de Ziad Rahbani qu’elle interprète elle-même pour la première fois, elle attise l’enthousiasme, l’ardeur, le sentiment de rébellion et de fierté blessée du public libanais qui s’enflamme aux seuls mots de «jayi maa el-chaab el-meskine» (Je me place aux côtés du pauvre peuple). Alternant ses apparitions sur scènes – qui n’excédaient pas les dix minutes d’affilée à la grande frustration de ses fans les plus ardents ! – avec les mordantes compositions de Ziad interprétées par un excellent groupe de chanteurs, la grande Feyrouz a tenu sous son charme, profond et mystérieux, durant plus d’une heure trente minutes, un public composé aussi bien de fidèles nostalgiques que de jeunes adorateurs. Lesquels, complètement subjugués, captivés, en délire, l’ont longuement bissée en vain, à la fin du premier rappel, pour qu’elle ne file pas sous leurs yeux. L’étoile.

La voix qui transcende tout...


Telle une énorme lame de fond, la foule, portée par un même élan, s’élance, déferle des gradins les plus éloignés vers la scène. Scandant, hurlant, le nom de son étoile : Feyrouz. Le public de Beiteddine était tout entier jeudi (lors de la première), aux pieds de son idole. Plus de cinq mille personnes, sans compter tous ceux qui s’étaient amassés aux alentours du palais des Émirs, qui communiaient dans une même ferveur à la source d’une voix incomparable transcendant n’importe quel texte, et s’élèvant au-dessus de tout orchestre. Feyrouz, l’unique. La grande dame de la chanson orientale est plus qu’une diva, plus qu’une voix légendaire, un véritable symbole de «libanité», dans son sens – si outrageusement maltraité – de dignité. C’est le constat que fait d’emblée tout auditeur qui assiste pour la première fois à l’un de ses concerts. Lorsqu’elle apparaît, après une heure d’attente, sur le tapis rouge déroulé spécialement pour elle, scintillante dans une robe d’Élie Saab, droite, distante et modeste tout à la fois, les gens se lèvent respectueusement. Dès les premières notes de la première chanson, à juste titre intitulée Idach kane fi nass (Combien de gens...), ils lui font un triomphe. Accompagnée, cette fois, de son fils Ziad Rahbani au piano et de l’orchestre d’Arménie (avec la participation de musiciens libanais, syriens, hollandais et français), dirigé par le maestro Karen Durgaryan à l’éloquence gestuelle et corporelle magistrale, la diva se lance en premier dans un répertoire de chansons romantiques. D’anciens titres réarrangés par Ziad et de nouvelles ballades écrites et composées par lui, au ton évidement plus piquant, comme ce sympathique Hobbaq kane hélou, we sar mech hélou (à l’approximative traduction : Notre amour était si beau et maintenant il sonne faux).

La Fameuse Fayrouz


Fairuz: elle est la plus grande des divas de la chanson arabe d’aujourd’hui et elle a imposé la musique libanaise face aux mastodontes du Caire et aux jeunes surdoués du Maghreb. Hypersensible, secrète et opiniâtre, délicieuse pour ceux qui ont gagné sa confiance, elle traite sa célébrité avec dédain et refuse toute récupération politique ou mercantile. Fairuz, c’est le Liban; sa géographie, son histoire.
Enfant, elle passait ses vacances chez sa grand-mère, à Dibiyeh, un village chrétien de la montagne; quelques maisons de pierre granitique autour d’une église dont le carillon sonne les heures. Les Druzes musulmans habitaient celui d’à côté, mais ce n’était pas chacun chez soi car on allait constamment de l’un à l’autre pour la récolte des olives, le dur travail de terres escarpées, les deuils et les fêtes. Un paysage de Méditerranée à l’antique, idéal de beauté lumineuse et cependant austère et dur, avec la mer en contrebas. La grand-mère avait passé quelques années en Amérique, elle racontait le vaste monde à sa petite-fille, et cet enracinement des Libanais qui mettent tant de courage à émigrer et tant de persévérance à pratiquer la nostalgie du sol natal.
Durant le reste de l’année, c’était Beyrouth, la mosaïque de communautés différentes, bien plus nombreuses et enchevêtrées que le résumé d’une simple ligne de partage entre chrétiens et musulmans. Au quartier populaire d’Al-Basta, où se côtoyaient les Arabes maronites évangélisés par les apôtres, les chiites fuyant la misère pour tenter leur chance à la ville, les Arméniens rescapés des massacres ottomans, les familles sunnites patriarcales, toute une humanité solidaire à qui la France avait permis de se reconnaître en une nation. Le père, Wadi, travaillait comme typographe, et la mère, Lisa, élevait ses quatre enfants dans une atmosphère de modestie chaleureuse où l’on ne manquait de rien parce qu’on ne demandait pas grand-chose à l’existence, hormis la tendresse et la sagesse.